Les chasseurs de génocidaires affirment que de nombreux suspects évitent la corde de la loi en se réfugiant dans les pays de l’Occident, ce qui est étonnant, mais aussi dans les pays africains. Même 27 ans après que le monde ait été témoin de l’un des pires génocides au Rwanda, de nombreux auteurs restent impunis.
Mercredi, à la veille de son anniversaire, l’Unité rwandaise de suivi des fugitifs du génocide (GFTU) a révélé que sur les 1 100 fugitifs du génocide toujours en liberté, la majorité 408 se trouvent dans la République démocratique du Congo voisine, 277 en Ouganda; 63 au Malawi, 15 au Burundi, 52 en Tanzanie, 47 en France, 42 au Congo Brazzaville et 40 en Belgique, selon les données de la GFTU.
Entre le 7 avril et le 15 juillet 1994, plus d’un million de personnes, principalement de la communauté ethnique tutsie et des Hutus de l’opposition au régime en place, ont été massacrés dans cette période de 100 jours.
De nombreux rescapés du génocide se demandent si justice sera jamais rendue.
Le rescapé Jonathan Sindikubwabo, a déclaré que « ceux qui ont le sang de notre peuple sur leurs mains doivent être tenus responsables. Les pays qui les protègent doivent les remettre s’ils ne peuvent pas les poursuivre », a-t-il déclaré.
Jean-Bosco Siboyintore, le chef de l’Unité de suivi des fugitifs du génocide, a accusé ces pays d’accueil d’avoir été incapables de poursuivre ou de remettre les suspects au Rwanda en raison d’un manque de volonté politique.
«Il y a un manque de volonté politique par laquelle vous trouvez que certaines personnes ou gouvernements, qui sont censées appliquer les actes d’accusation ne sont pas favorables ou n’y attachent aucune importance, pourtant le génocide est un crime international», a-t-il déclaré.
Les experts estiment qu’il y a peu de chances que les autorités de la RDC, du Burundi et de l’Ouganda agissent, car les suspects se confondent avec les ressortissants de ces pays en se mêlant librement à la communauté linguistique kinyarwanda avec laquelle ils partagent la langue.
Beaucoup se sont désignés comme Congolais d’origine Banyamulenge, Burundais et Ougandais d’origine Bufumbira qui parlent la langue kinyarwanda.
Fausses identités
«Ces fugitifs vivent sur de fausses identités, se déplaçant sur de fausses nationalités et de faux noms, ce qui pose un grand défi pour le traquer», a déclaré Siboyintore. Un certain nombre n’ont pas hésité à se présenter comme des survivants de génocide et même de créer des associations revendiquant les droits et la protection. Ainsi au Kenya se cacheraient 35 suspects, aux États-Unis, il y aurait 23, aux Pays-Bas se cacheraient 18 et au Canada, 14 suspects.
Alors que le parquet rwandais travaille avec l’Association des procureurs africains pour suivre ces fugitifs, l’absence de traités d’extradition avec certains pays rend en partie leur tâche difficile.
Le Rwanda a jusqu’à présent signé des traités d’extradition avec 10 pays, sur 30, où les suspects se cacheraient.
Siboyintore a déclaré que son organisation avait préparé des preuves prima facia qui peuvent être testées. Selon la procédure qui conduit à l’acte d’accusation, les États hôtes sont invités à se rendre sur les lieux du crime au Rwanda pour mener leur propre enquête.
Il a déclaré que les longues procédures excessives ont conduit à supposer que la justice échappera aux victimes et qu’il n’y a pas de clôture des affaires. Il a ajouté qu’en l’absence d’un système d’identification numérique, il devenait difficile d’identifier les coupables dans les pays africains.
«Certains des suspects sont devenus des citoyens nationalisés dans les pays d’accueil, où ils ont cherché refuge. Certains pays n’ont pas de lois pour punir le crime de génocide », a déclaré Siboyintore.
Le mécanisme traditionnel de résolution des conflits du Rwanda, Gacaca, qui a achevé ses travaux en 2012, a jugé près de 2 millions de suspects en 10 ans.
Le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) créé en novembre 1994 a travaillé à Arusha, en Tanzanie, et a condamné 61 personnes à la réclusion à perpétuité pour leur rôle dans les massacres. Il a également acquitté 14 personnes, tandis que 10 autres ont été déférées aux tribunaux nationaux.
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