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Par La Libre

La justice française a-t-elle trop tardé ? Vingt-sept ans après le génocide des Tutsi au Rwanda, l’état de santé de l’ex-capitaine Paul Barril, 74 ans, rend incertaine sa mise en examen, au désespoir des parties civiles qui réclament un procès pour celui qu’elles accusent de complicité du régime génocidaire.

L’ex-gendarme de l’Elysée sous François Mitterrand, reconverti dans les années 1980 dans la sécurité de chefs d’Etat africains, n’a été entendu pour la première fois qu’en mai 2020 par une juge d’instruction du pôle crimes contre l’humanité du tribunal de Paris, après huit ans d’investigations.

L’enquête avait été ouverte après une plainte pour complicité de génocide déposée en 2013 par l’association Survie, la Fédération internationale des droits de l’Homme (FIDH) et la Ligue des droits de l’Homme (LDH).

Au coeur des accusations des trois ONG: la présence de Paul Barril au Rwanda en plein génocide et la signature d’un contrat de formation militaire et de conseil le 28 mai 1994 avec le gouvernement intérimaire rwandais (GIR), alors qu’un embargo international avait été imposé par l’ONU.

Derrière ces activités, les associations soupçonnent aussi le président François Mitterrand ou le gouvernement d’Edouard Balladur d’avoir potentiellement utilisé le capitaine Barril au service d’une « stratégie indirecte » de la France pour soutenir le régime rwandais face aux rebelles, une accusation objet de vives controverses depuis plus de vingt-cinq ans.

Paul Barril, qui a eu maille à partir avec la justice dans d’autres affaires comme celles des écoutes de l’Elysée ou des Irlandais de Vincennes au début des années 1980, a contesté avoir signé ce contrat de 3 millions de dollars, partiellement exécuté et payé.

 Expertise graphologique

Selon des sources concordantes, une expertise graphologique a toutefois conclu en novembre que la signature sur le contrat était bien la sienne.

Les 28 et 29 mai 2020, le septuagénaire, atteint de la maladie de Parkinson, a été interrogé par la juge d’instruction comme « témoin assisté », statut intermédiaire entre simple témoin et mis en examen.

Devant la magistrate, l’ex-numéro 2 du Groupe d’intervention de la gendarmerie nationale (GIGN) a raconté s’être rendu au Rwanda en mai 1994, avec plusieurs hommes recrutés via sa société Secrets, pour enquêter sur l’attentat contre l’avion du président hutu Juvénal Habyarimana le 6 avril 1994, à la demande de la veuve de ce dernier, Agathe Kanziga.

Cet attentat a déclenché les massacres au cours desquels environ 800.000 personnes, essentiellement de la minorité tutsi, ont été tuées en trois mois.

Paul Barril a affirmé s’être rendu également au Rwanda pour « faire du renseignement » pour le compte de la France et être reparti en y laissant quatre hommes pour exécuter un « audit des forces spéciales rwandaises ». Des photos retrouvées en perquisition chez ses ex-mercenaires les montrent toutefois armés, parfois lourdement, laissant penser qu’ils formaient des militaires rwandais voire combattaient à leurs côtés.

Cinq mois après cette audition, la magistrate a demandé au parquet un réquisitoire supplétif pour élargir ses investigations à des soupçons d’ »association de malfaiteurs » en vue de commettre un génocide, une infraction plus simple à poursuivre car elle n’exige que la démonstration d’ »actes préparatoires » aux crimes.

Cette nouvelle étape laissait augurer une possible mise en examen de M. Barril.

Toutefois, un rapport médical est venu doucher les espoirs des parties civiles de le voir un jour jugé aux assises.

Dans une expertise du 22 décembre 2020 dont l’AFP a eu connaissance, le neurologue indique que la maladie du capitaine est « parvenue à son niveau le plus élevé », ce qui ne lui permet « plus de soutenir ni audition ni confrontation ».

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